Dans
mes 25 disques préférés, il y a quatre Beatles, deux Lou Reed, deux
Velvet Understones deux Rollinground, deux Bob Dylan, deux Fugs, deux
Nougabrel, deux Brassens, un
Dutronc, un Fleetwood Shack, un Chicken Mac, un Dexys Mid- night Blind, un
Third Eye Runners, un Jack Stripes et un White White. Σ = 3² + 4² = 5² OK !
jeudi 31 décembre 2015
mercredi 30 décembre 2015
lundi 28 décembre 2015
AUTOUR DE LA MAISON (8)
Le
cri d'un corbeau me fit tressaillir.
Puis je me pris à songer aux voyages que j'avais faits. À mon
premier
séjour au sud du Sénégal. À mon retour, j'avais raconté à mon père comment j'avais vécu dans un petit village, sans électricité, sans route et sans voiture. D'ordinaire peu
démonstratif, il
s'était exclamé « c'était comme ça ici, quand j'étais gosse, à la
montagne, on vivait comme ces gens que tu connais là-bas ! » Et en un
éclair j'avais mesuré le
bouleversement énorme qui avait secoué le monde, ici après la guerre. Là-bas au Sénégal, dans les petits villages il commençait à peine, mais il
allait si
vite que bientôt la planète entière connaîtrait le même rythme : le
rythme des moteurs. Les voix des sapins reprirent leurs
murmures. La ferme de ton père a fondu dans les pierres, dans une mer
de verdure,
comme fondent en ce moment les glaces du Groenland, quelque chose de
vertigineux, vous les hommes vous croyez pouvoir évaluer l'ampleur du
changement, l'ampleur de la portée de vos propres actions, regarde, ma
petite murmurait l'un d'entre eux en pointant vers mon cœur le bout
d'une petite branche. Regarde-nous, tu nous connais, on n'a pas
l'habitude de raconter des craques, sauf par temps de grand vent,
regarde tout
ce vert, toutes ces mousses qui nous poussent, sur les bois morts de nos
efforts, regarde-nous et souviens toi, cette planète change à toute
vitesse, et
de plus en plus vite, tu crois qu'un jour ou l'autre ça devra s'arrêter mais
tu as la vue basse, là où tu vois une fin il n'y a qu'un début, ça
bouge ça bouge ça bouge sans cesse, les espèces naissent et disparaissent, de
nouvelles prennent leur place, vous les hommes, tout comme nous, vous
n'y
couperez pas. Les sapins s'assombrirent. Au fur et à
mesure qu'ils prenaient l'air sévère, je
voyais s'avancer un nuage au dessus de leur tête. Ils
changèrent de sujet, passant du coq à l'âne comme à leur habitude.
( à suivre )
vendredi 25 décembre 2015
l'autre nuit, le flipper de mon corps réel rattaché au physique a fait tilt... les bumpers du haut de tableau ne répondaient plus à la chère et dure sollicitation de la silver ball... et la grosse bille argentée de dévaler le boulevard central du beau jeu pour s'engouffrer comme une voleuse dans le portail central béant, sans que retentisse le plus petit bip, sans que soit marqué le moindre point... affres des défenses percées et des attaques avortées... le feu d'artifice sous verre réduit à un vulgaire aquarium qui se vide de son eau, sans laisser passer les poissons qui suphoquent en silence... tommy or not tommy, c'est la question qui se posait au pinball wizard de bazard... que faire devant une telle débâcle, si retentissante, si ahurissante, si incompréhensible... non, pas de point d'interrogation pour clore un constat si affligeant, les trois valeureux points de suspension interrogent encore plus crûment le réel, surtout dans une configuration du pire, comme c'était le cas... ne rien faire n'est pas une hypothèse réaliste, tout faire non plus... attendre et voir, oui, si on entend bien A-T-T-E-N-D-R-E et si on veut bien V-O-I-R... plus facile à dire qu'à faire... alors l'attaché aux rêves du corps réel a tranché dans le vif, à la minorité des 2 quator-zièmes, une décision qui équivaut à retirer deux chansons dans un album des Beatles...
mercredi 23 décembre 2015
je me suis fait prendre par la brigade du temps, de l'heure... maintenant j'attends leur jour, leur heure, leur leurre... mains tenues, pieds pesants, tout est compromis... faire appel au médiateur ? ça prend des jours et je suis un homme hop pressé... allo police ?.. oui monsieur, qu'est-ce que je peux faire pour vous ?.. vous ôter un poids aux jambes ? ah pour ça il faudrait que j'aie quelqu'un sous la main... est-ce qu'une main courante vous soulagerait ?
mardi 22 décembre 2015
lundi 21 décembre 2015
AUTOUR DE LA MAISON (7)
Mais au lieu de m'oppresser, ils m'accueillaient à bras ouverts. Le bruit de la rivière comme le rire du
grand-père. Ici je me sentais en sécurité absolue. La voiture s'est garée toute seule.
Toujours au même endroit. Là où je
venais écrire du bizarre, à bicyclette,
en mobylette, j'avais seize dix
sept ans. Une table et deux bancs pas loin de la
route. La rivière, tout près, muait en torrent. Elle muait sans qu'on la voie, quelques mètres plus bas, avec de petits cris
d'oiseau. Je descendis de la voiture. J'avais les
jambes qui flageo- laient. J'allai m'assoir au bord de l'eau. Ici ma mère n'avait pas d'âge. Les sapins se tenaient bien droit. Je
demeurai la tête levée, assez longtemps, ainsi que je le faisais, bien des années auparavant. Peu à peu les sapins se mirent à onduler, impercep- tiblement, puis leur danse devint plus osée. Elle épousait la brise en
d'ardentes étreintes. Au début je n'entendais rien sinon les cris d'oiseaux
mais petit à petit me parvenaient des sons, plutôt des murmures, qui me
saisissaient et mobilisaient toute mon attention. Je me dis tout à coup que c'était pure
folie. Et dans le même temps je pensai que oui,
j'aurais pu devenir folle, si je
n'avais pas laissé, avec les
sapins, dans ces moments-là, ma folie se lâcher. Les sapins. Leur voix douce. Les mots qu'ils finissent par dire,
quand nos oreilles se changent en
feuilles. Ce jour là ils me parlèrent de la famille
de mon père. Tu vois ce petit homme, me
soufflaient-ils, ce petit homme presque fluet, à la voix douce, au regard droit, il croyait au bon Dieu, tous
les dimanches matin il allait à la messe, il vous y amenait, et cependant
jamais il ne vous a parlé de sa foi si présente. Elle se voyait toute seule. Il a grandi dans la montagne, là où l'on
parle avec les yeux. Aîné de deux garçons. Tu n'as rien connu de leur ferme.
Lorsqu'il t'y a conduite, un jour d'été, l'après-midi, tu avais six ans, tu
t'en souviens mal, tu vois quand même ces murs en ruine, envahis par les
ronces. « Papa regarde les belles mûres, s'il te plaît tu peux en cueillir ? » Il en cueille quelques-unes et
les pose dans ta main, elles sont délicieuses. Ton père te dit « Tu sais, la ferme était très vieille » tu ne comprends pas mais tu as le goût de la mûre dans la bouche, et
pour toi la ferme se tient toute entière dans ce petit fruit. Tu n'as pas vu la ferme mais tu y as goûté.
Et à la place des ruines tu as trouvé la
vie. Les sapins se turent. Je savais que parfois leur voix
s'évaporait.
( à suivre )
samedi 19 décembre 2015
vendredi 18 décembre 2015
j'aime
pas les topines en bourre et les rododindrons, j'aime pas
l'ortografe et la sainte taxe, ni les infinitifs, surtout
au subjonctionnel, les allez louyah, les curés et les saints pausiomes,
les rabins, les himames, les papes et les pop, sauf iggy, mais le
peer import c'est johny halliday et cristian jacob, deux pite-bulles baveux shootés à
l'adjuvant de la baie de souris, voilà, par contre un petit merçi à la wii, je suis par temps hilico presse tôt.
jeudi 17 décembre 2015
mercredi 16 décembre 2015
lundi 14 décembre 2015
AUTOUR DE LA MAISON (6)
La route qui menait aux sapins sillonnait
la vallée, reliant deux villages dont l'évolution, ces dernières années,
prenait un sens inverse. Celui du bas, où la vallée s'élargissait, changeait de peau. Il s'agrandissait, se modernisait. Une
nouvelle école, plus grande que l'ancienne, accueillait les enfants de la
commune entière. Les écoles des hameaux avaient fermé leurs portes mais
celle-là rutilait, avec son toit brillant et ses murs de bois rouge. Sortie de
terre un peu plus loin, la nouvelle salle des fêtes rivalisait de courbes,
d'élans, d'audace, de matériaux nouveaux. Alors que dans mon
enfance il paraissait presque sans vie, le village du bas, comparé à celui du
haut, redressait la tête. C'était lui, à présent, qui drainait toutes les
énergies. À l'inverse, encastré, serré à la gorge
par les pentes abruptes, le village du haut
se ratatinait. Il se repliait sur
ses maisons vides, ses volets clos, ses murs ridés. Et en le traversant, je
songeai aux années où il exhibait sa vitalité, ses usines, son marché, ses
cafés, sa fanfare, son gymnase. Aujourd'hui les usines s'étaient carapatées en laissant là leurs
carapaces, le marché se réduisait à l'étal du boulanger, les cafés avaient disparu, la fanfare
n'existait plus et le gymnase avait fait place à un garage qui végétait. Les villages naissent, grandissent et meurent. Mais ils ont plusieurs vies. Comme ces arbres au tronc mort d'où
jaillissent des rejets. Que devien- draient ces lieux dans un siècle ou deux ? Tout au bout du village, la route,
étroite, conti- nuait. Strictement inchangée. Ni élargie ni rectifiée. Juste un peu ravaudée, par endroits, comme
jadis, comme toujours. Elle s'enfonçait dans les replis de la montagne,
larguant une à une les habitations, comme une montgolfière qui se déleste de
sacs de sable pour attraper de l'altitude, elle longeait des prairies obliques,
de plus en plus étroites, côtoyait des Feuillus et quelques Conifères - deux tribus
qui vivaient en complète harmonie - pour parvenir à une rivière qu'elle
traversait d'abord puis frôlait sur des kilomètres, avec des façons de fauve en
chaleur. Et c'est là que tout commençait. Les sapins sombres tout autour se
resserraient de plus en plus sur ce cordon d'asphalte.
( à suivre )
vendredi 11 décembre 2015
jeudi 10 décembre 2015
mardi 8 décembre 2015
lundi 7 décembre 2015
AUTOUR DE LA MAISON (5)
Elle qui nettoyait tout. Le choc que j'attendais ne venait pas du sol, des traces de sang séché, mais de tout ce laisser-aller qui me jetait à la figure son incapacité. Elle n'arrivait plus à vivre sa vie. Elle ne pouvait plus. Elle ne voyait plus. Elle laissait la poussière, jour après jour, gagner sur elle. Je nettoyai toute la cuisine, les meubles, les vitres, je lavai la vaisselle, récurai le plancher, passai l'éponge partout, eau de javel, désinfectant, je voulais supprimer les traces de sa défaite, je voulais vaincre la poussière, oui je voulais venger ma mère. Et quand j'eus terminé, je pris conscience du ridicule, de la vanité de ma réaction. J'ouvris alors toutes les fenêtres, de toutes les pièces, pour faire entrer l'air frais, les rayons du soleil, pour noyer mon chagrin dans l'ivresse du printemps. Je montai au grenier, retrouvant dans les escaliers ce dessin au pastel, esquissé par mon frère, un boulet au bout d'une chaîne attachée au pied d'un homme, avec cette inscription : Nul ne sera tenu (on lisait mal la suite) en servitude. J'aspirai l'air à plein poumons. Le grenier débordait de senteurs oubliées. J'y demeurai de longues minutes, retrouvant dans les coins des passés incertains. Je mesurais l'incomplétude de ma mémoire. Elle ne me gênait pas. Je laissais filer les étoiles filantes de mes souvenirs. Je larguais des amarres. Une sensation de liberté, de liberté chérie, m'envahit tout à coup. C'était tellement inattendu que je poussai un cri. Et ma voix sonnait clair. Et contre toute attente je me sentis heureuse. Le reste fut sans histoires. Je remplis mes devoirs. La maison aérée, nettoyée, respirait. Je pouvais enfin me mettre en chemin. Aller me présenter, là haut dans la montagne, aux voix nues des sapins. Et ma mère ne m'en voudrait pas.
( à suivre )
vendredi 4 décembre 2015
LES BONS PLANS (27)
Aviez-vous remarqué que les roues arrière de votre voiture ne parcourent pas la même distance que les roues avant ? Après plus de quarante-deux ans de conduite, je n'en avais pas vraiment pris conscience. Il a fallu pour cela qu'un policier municipal ou quelque autre agent territorial, intrigué par l'immobilité de mon véhicule stationné depuis quinze jours sur le parking de la maison de retraite, trace sur chaque pneu un petit témoin à la peinture blanche au niveau du sol. Deux jours après avoir déplacé ma fidèle rossinante, j'eus la surprise de constater, alors que les traits sur les roues avant étaient en haut, que ceux sur les roues arrière étaient décalés d'un quart de tour. Il y a donc un différentiel avant arrière, sans doute les roues arrière étant à la traîne, à la remorque en quelque sorte, parcourent-elles plus de mètres. En cas de marche arrière, ce serait l'inverse, mais peu fréquent. Reste à déceler un écart éventuel entre les roues droites et les roues gauches. J'ai observé un tout petit delta entre les témoins des deux roues avant, peut-être dû au fait que j'aurais plus souvent tourné à gauche qu'à droite, ou bien l'inverse, les jours derniers. Nul doute qu'après une plus longue période, significative, les virages à droite et à gauche s'équilibrant, la distance réelle parcourue par chaque roue sera rigoureusement la même.
Aviez-vous remarqué que les roues arrière de votre voiture ne parcourent pas la même distance que les roues avant ? Après plus de quarante-deux ans de conduite, je n'en avais pas vraiment pris conscience. Il a fallu pour cela qu'un policier municipal ou quelque autre agent territorial, intrigué par l'immobilité de mon véhicule stationné depuis quinze jours sur le parking de la maison de retraite, trace sur chaque pneu un petit témoin à la peinture blanche au niveau du sol. Deux jours après avoir déplacé ma fidèle rossinante, j'eus la surprise de constater, alors que les traits sur les roues avant étaient en haut, que ceux sur les roues arrière étaient décalés d'un quart de tour. Il y a donc un différentiel avant arrière, sans doute les roues arrière étant à la traîne, à la remorque en quelque sorte, parcourent-elles plus de mètres. En cas de marche arrière, ce serait l'inverse, mais peu fréquent. Reste à déceler un écart éventuel entre les roues droites et les roues gauches. J'ai observé un tout petit delta entre les témoins des deux roues avant, peut-être dû au fait que j'aurais plus souvent tourné à gauche qu'à droite, ou bien l'inverse, les jours derniers. Nul doute qu'après une plus longue période, significative, les virages à droite et à gauche s'équilibrant, la distance réelle parcourue par chaque roue sera rigoureusement la même.
jeudi 3 décembre 2015
mardi 1 décembre 2015
1.4.1965
Chers parents,
Une fois de plus je sens sous mes talons les côtes de Rossinante ; je reprends la route le bouclier au bras. Il y a de cela presque dix ans, je vous avais écrit une autre lettre d'adieu. Si je me souviens bien, je me plaignais de ne pas être meilleur soldat et meilleur médecin ; médecin, ça ne m'intéresse plus ; comme soldat, je ne suis pas si mauvais. Rien n'a changé fondamentalement, sinon que je suis beaucoup plus conscient, que mon marxisme s'est approfondi et décanté. Je crois en la lutte armée comme unique solution pour les peuples qui luttent pour se libérer, et je suis cohérent avec mes croyances. Beaucoup me traiteront d'aventurier et j'en suis un ; mais d'un type différent : de ceux qui risquent leur peau pour défendre leurs vérités. Il se peut que cette fois soit la dernière. Je ne le cherche pas, mais c'est dans le calcul logique des probabilités. Si c'est le cas, je vous embrasse pour la dernière fois. Je vous ai beaucoup aimés, seulement je n'ai pas su exprimer ma tendresse ; je suis extrêmement rigide dans mes actes et je crois que parfois vous ne m'avez pas compris. Ce n'était pas facile de me comprendre ; mais, aujourd'hui, je vous demande seulement de me croire. Maintenant, une volonté que j'ai polie avec une délectation d'artiste soutiendra des jambes molles et des poumons fatigués. Je le ferai. Souvenez-vous de temps en temps de ce petit condottiere du XXème siècle. Un baiser à Celia, à Roberto, Juan Martin et Pototin, à Beatriz, à tous.
Je vous embrasse, votre fils prodigue et récalcitrant,
Ernesto
Chers parents,
Une fois de plus je sens sous mes talons les côtes de Rossinante ; je reprends la route le bouclier au bras. Il y a de cela presque dix ans, je vous avais écrit une autre lettre d'adieu. Si je me souviens bien, je me plaignais de ne pas être meilleur soldat et meilleur médecin ; médecin, ça ne m'intéresse plus ; comme soldat, je ne suis pas si mauvais. Rien n'a changé fondamentalement, sinon que je suis beaucoup plus conscient, que mon marxisme s'est approfondi et décanté. Je crois en la lutte armée comme unique solution pour les peuples qui luttent pour se libérer, et je suis cohérent avec mes croyances. Beaucoup me traiteront d'aventurier et j'en suis un ; mais d'un type différent : de ceux qui risquent leur peau pour défendre leurs vérités. Il se peut que cette fois soit la dernière. Je ne le cherche pas, mais c'est dans le calcul logique des probabilités. Si c'est le cas, je vous embrasse pour la dernière fois. Je vous ai beaucoup aimés, seulement je n'ai pas su exprimer ma tendresse ; je suis extrêmement rigide dans mes actes et je crois que parfois vous ne m'avez pas compris. Ce n'était pas facile de me comprendre ; mais, aujourd'hui, je vous demande seulement de me croire. Maintenant, une volonté que j'ai polie avec une délectation d'artiste soutiendra des jambes molles et des poumons fatigués. Je le ferai. Souvenez-vous de temps en temps de ce petit condottiere du XXème siècle. Un baiser à Celia, à Roberto, Juan Martin et Pototin, à Beatriz, à tous.
Je vous embrasse, votre fils prodigue et récalcitrant,
Ernesto
lundi 30 novembre 2015
AUTOUR DE LA MAISON (4)
Les escaliers de bois craquaient toujours autant. Combien de fois les avait-elle, et jamais les mains vides, montés et descendus ? Le long des marches, les tapisseries, toujours les mêmes, bien conservées, supportaient les mêmes clous depuis des décennies, où tenaient accrochées les mêmes décorations, un titi parisien venu de l'inconnu, des fleurs bleues en plastique, made in Pétrochimie, un tout petit tableau, peint sur une plaque en bois, un paysage de neige avec un ciel très sombre, il allait reneiger, encore, neiger, encore, on sentait la présence de gros flocons tout près, on sentait le poids du silence, on attendait avec ardeur venir la blancheur qui vous éblouit et qui vous rend sourd, ce paysage s'était ancré dans mes entrailles. Bien plus que cette photo, juste à côté, de la maison prise d'un avion. Il n'y avait qu'un seul voisin, autour d'elle, à l'époque, depuis s'étaient dressées d'autres habitations, puis au dessus des escaliers, à gauche, une porte large ouverte. Celle de la cuisine. J'avais peur d'entrer. Sur la table, une bouteille. Et un verre. Les chaises éparpillées. Les volets à moitié tirés. Des casseroles laissées en plan. Un torchon abandonaillé. Je finis par baisser les yeux. Une tache sur le lino. Large et sombre. Presque noire. Du sang, sans doute. Elle était tombée là. Des traces de boue séchée à peine un peu plus loin. Il devait pleuvoir ce jour là. Les pompiers, avec leurs bottes. Pour ne pas y penser, j'allai chercher la serpillère, la pelle et le balai et je me mis à nettoyer. Et plus je nettoyais, plus je voyais combien ma mère avait changé. L'évier n'était pas propre, les casseroles mal lavées, de la poussière grasse sur la cuisinière, des taches sur la toile cirée. Non ce n'était plus elle.
Les escaliers de bois craquaient toujours autant. Combien de fois les avait-elle, et jamais les mains vides, montés et descendus ? Le long des marches, les tapisseries, toujours les mêmes, bien conservées, supportaient les mêmes clous depuis des décennies, où tenaient accrochées les mêmes décorations, un titi parisien venu de l'inconnu, des fleurs bleues en plastique, made in Pétrochimie, un tout petit tableau, peint sur une plaque en bois, un paysage de neige avec un ciel très sombre, il allait reneiger, encore, neiger, encore, on sentait la présence de gros flocons tout près, on sentait le poids du silence, on attendait avec ardeur venir la blancheur qui vous éblouit et qui vous rend sourd, ce paysage s'était ancré dans mes entrailles. Bien plus que cette photo, juste à côté, de la maison prise d'un avion. Il n'y avait qu'un seul voisin, autour d'elle, à l'époque, depuis s'étaient dressées d'autres habitations, puis au dessus des escaliers, à gauche, une porte large ouverte. Celle de la cuisine. J'avais peur d'entrer. Sur la table, une bouteille. Et un verre. Les chaises éparpillées. Les volets à moitié tirés. Des casseroles laissées en plan. Un torchon abandonaillé. Je finis par baisser les yeux. Une tache sur le lino. Large et sombre. Presque noire. Du sang, sans doute. Elle était tombée là. Des traces de boue séchée à peine un peu plus loin. Il devait pleuvoir ce jour là. Les pompiers, avec leurs bottes. Pour ne pas y penser, j'allai chercher la serpillère, la pelle et le balai et je me mis à nettoyer. Et plus je nettoyais, plus je voyais combien ma mère avait changé. L'évier n'était pas propre, les casseroles mal lavées, de la poussière grasse sur la cuisinière, des taches sur la toile cirée. Non ce n'était plus elle.
( à suivre )
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