lundi 3 septembre 2012

LA FIN (suite)

"Une fois sur la route je n'avais qu'à suivre la pente. Des charrettes bientôt, mais toutes me refusèrent. Si j'avais eu d'autres vêtements, un autre visage, on m'aurait pris peut-être. J'avais dû changer depuis mon expulsion du sous-sol. Le visage notamment avait dû atteindre sa climatérique. Le sourire humble et naïf ne venait plus, ni l'expression de misère candide, contenant les étoiles et les fuseaux. Je les appelais, mais ils ne venaient plus. Masque de vieux cuir sale et poilu, il ne voulait plus faire s'il vous plaît et merci et pardon. C'était malheureux. Avec quoi allais-je ramper, à l'avenir ? Couché sur le bord de la route, je me mettais à me contorsionner chaque fois que j'entendais venir une charrette. C'était pour qu'on ne s'imaginât pas que je dormais, ou me reposais. J'essayais de gémir, Au secours ! Mais le ton qui sortait était celui de la conversation courante. Je ne pouvais plus gémir. Ce n'était pas encore la fin et je ne pouvais plus gémir. La dernière fois qu'il m'avait fallu gémir je l'avais fait, bien, comme toujours, et cela en l'absence de tout cœur à fendre. Qu'allais-je devenir ? Je me dis, Je rapprendrai. Je me couchai à travers la route, à un endroit où elle était étroite, de sorte que les charrettes ne pouvaient passer sans me passer sur le corps, d'une roue au moins, de deux s'il y en avait quatre. L'urbaniste à la barbe rouge, on lui enleva la vésicule biliaire, une grosse faute, et trois jours après il mourait, dans la force de l'âge. Mais le jour vint où, regardant autour de moi, je me trouvai dans les faubourgs, et de là aux vieilles erres ce n'était pas loin, au-delà du stupide espoir de repos ou de moindre peine. Je me couvris donc le bas du visage d'un chiffon noir et allai demander l'aumône à un coin ensoleillé"...

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