mardi 6 février 2018

Quand j'eus 20 ans, mon groupe préféré redevint les Rolling Stones. Les Beatles étaient séparés depuis 2 ans, laissant le champ libre à leurs dauphins naturels, comme disent les journalistes politiques. J'avais fait le voyage de la Porte de Versailles en 70, je fis celui de Berne, des Abattoirs de Paris, celui de Lyon. J'avais tous les disques. La question ne se posait pas de savoir qui pouvait leur disputer ma préférence. C'est avec Tatoo You que survint l'hypothèse d'un après. Que resterait-il quand il n'y aurait plus de Rolling Stones ? Il fallait être lucide, cela arriverait un jour. Après le concert à l’hippodrome d'Auteuil en 1982, je pressentis que je n'irais plus voir Mick, Keith, Charlie & Bill. La magie était partie, il ne restait que le charme. Mon panthéon était décousu, et si ça continuait, on verrait le trou de mon panthéon, etc. Comme avec Bob Dylan dix ans plus tôt, je me repliai sur les disques de la DécaDe proDigieuse. Et au milieu de ce ciel noir de vinyle étoilé, certains brillaient d'un éclat particulier. La banquise lisse de The Beatles, les arbres verts, les bandes blanches, le ciel bleu d'Abbey Road, la casquette et la moustache du Sergent Pepper, le cadre noir en forme de faire-part de Let It Be. La panoplie du Rock and roll, patchwork de cuir noir, Hells Angels, alcools, décibels, sexe, drogues et chambres d'hôtel dévastées, n'était plus qu'un petit tas de cendres. Bien sûr, je ne parlais pas de cette disposition qui me faisait tourner la tête vers Liverpool pour la prière du soir. J'allais voir Mink DeVille, Dexys Mid.Runners, Wilko Johnson, car je tenais à garder une vie sociale. Mais tirez sur le pianiste élastique, il finit par faire une fausse note et casser. Les Beatles étaient tableau virtuel au mur de mon séjour, format Figure. Aujourd'hui, ils sont Paysage.

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