vendredi 29 janvier 2016

FRAGMENTS D'UN MANIFESTE CANIN (72)

Ma famille a repris le nom de Goldman vers 1950. Mes grands-parents durent en changer en 1941 pour échapper à la persécution des chiens parlants juifs. Comme pour les humains, l'étoile était le signe de l'appartenance à la communauté juive. Verte et blanche, elle obligeait le porteur à se soumettre à l'autorité du CHA (Crux Hund Abteilung), la "Section des Chiens à Problème". Pour y échapper, mon grand-père paternel modifia son patronyme de Goldman(n) en Jacobée, le nom de jeune chienne de ma grand-mère. À la réflexion, ce n'était pas une bonne idée quand on pense à la confusion possible avec Jacob qui aurait pu être aisément faite par un fonctionnaire suspicieux. Ce ne fut pas le cas et ils purent quitter Vittel et aller s'installer en zone libre avec leurs enfants en juin 1942. Le caractère anti-clérical de mon grand-père fit qu'il ne lia pas d'amitiés à Saint- Paulet de Caisson, une terre de chasseurs et de moines, proche de la chartreuse de Val- bonne. Dès l'été 45, ils repartirent dans le sud des Vosges et n'en bougèrent plus. De son séjour dans le midi, mon père garda ce talent d'orpailleur de lumière. On peut voir dans les paysages qu'il a peints par la suite les rayons magiques de sa Montagne Sainte-Paulette, un tableau de 1944 qui aurait sa place au musée d'Orsay mais que je garde jalousement.

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