lundi 17 décembre 2012

FRAGMENTS D'UN MANIFESTE CANIN (7)

Entre chiens, on se comprend. Certains parlent le dogwap - l'équivalent de l’espéranto chez les humains - d'autres uniquement leur dialecte racial ou ethnique, d'autres encore parlent certaines langues humaines en plus de tous les systèmes que je viens de citer. Par contre, en ce qui concerne la liberté d'expression accordée aux chiens, la situation est critique, voire paradoxale. Alors que la population canine mondiale (environ 4.750 millions au 1er janvier 2010) est égale à 67% de la population humaine, elle est maintenue dans un état de domesticité et de rusticité révoltantes. Très peu de chiens ont accès aux médias et une infime proportion de ceux-ci peuvent s'exprimer par le biais de la littérature, de la musique ou des arts graphiques. Quand je dis une infime proportion, je devrais dire aucun. Je connais personnellement des artistes canins et je les lis, les écoute ou les admire, mais c'est dans l'anonymat et la clandestinité que la société leur octroie. Conséquemment, comme dirait Sam Cutler recadrant les Hells Angels à Altamont, je me console avec les artistes humains non anthropocentrés, qui sont très peu nombreux et, de par la nature même de leur engagement, très peu médiatisés.
« On nous a tant dit que nous étions exceptionnels ! Centre du monde, enfants de Dieu, conscience du tout, sel de la terre, intelligence, êtres parlants, esprit des sciences, vecteur du progrès. Notre existence fut si fêtée par tant de mythes, de religions, de philosophies, de discours complaisants qu'on ne comprend plus nos échecs, nos bassesses, nos guerres interminables et nos boues sans nombre (...) Observez lucidement cette espèce absurde et violente. Regardez en face son absence de justification, son existence éphémère et insensée. Exercez-vous à endurer cette idée que l'humanité n'a fondamentalement ni raison d'être, ni avenir. Cela devrait contribuer à vous rendre serein »  ©  Roger-Pol Droit, 101 expériences de philosophie quotidienne - Éditions O. Jacob 2001

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