mardi 18 septembre 2018

Le matin, j'ai trié des disques et rempli un bac de LPs à vendre. J'entre dans une officine dédiée à l'achat et à la vente d'objets divers, dont domestiques. Le guichet du négoce est occupé, je patiente dans la petite salle d'attente. À côté de moi, un de mes semblables, venu proposer un lot du même genre. Nous engageons la conversation, chacun lorgnant sur le bac de l'autre. Tout naturellement, nous échangeons donc notre marchandise. Alors que l'homme sort de ma boîte plusieurs Deep Purple et un London Calling, mon index fouit la sienne et s'arrête sur un maxi de Paul et Linda McCartney. La palette de la pochette est dans les verts et les bruns, plus british tu meurs. C'est une photo prise dans la campagne que je n'ai jamais vue. La photo, pas la campagne. Paul a sa tête des années 90, une pomme verte un peu ridée, mais encore très mangeable. À l'inverse, Linda est de profil, et pas du bon. Elle ressemble à une vieille anglaise de l'époque coloniale, mal fagotée, au visage rassis bordé de frisettes. Sa mâchoire est crispée, son nez busqué, elle fait peine - et peur - à voir. Plutôt que le nom des chansons, je cherche la date de sortie du disque. 1998, l'année de sa mort. Je dois faire une drôle de tête car mon voisin s'inquiète : ça ne va pas, monsieur ? vous êtes tout pâle ! Non, ce n'est rien, ça va passer, c'est juste la photo de Linda. Qu'est-ce qu'elle a ? Elle a dû être prise peu de temps avant sa mort. Ah, c'est elle qui est partie la première, je croyais que c'était son mari. Dieu des mods et des rockers réconciliés, que répondre à une telle ineptie ? Rien, changer de sujet. Si vous êtes d'accord, je vous le prends, dites-moi votre prix ou bien choisissez-en un en échange. OK. Ça ne fait rien, il y a des manipulateurs de vinyles bien singuliers.

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