mercredi 14 décembre 2016

JOURS INTRANQUILLES À AUVERS (14)

Lettre à Paul Gauguin  (sans date)

Mon cher ami Gauguin,
Merci de m'avoir de nouveau écrit mon cher ami et soyez assuré que depuis mon retour j'ai pensé à vous tous les jours. Je ne suis resté à Paris que trois jours et le bruit, etc., parisien me faisant une bien mauvaise impression, j'ai jugé prudent pour ma tête de ficher le camp pour la campagne, sans cela j'aurais bien vite couru chez vous. Et cela me fait énormément plaisir que vous dites que le portrait d'Arlésienne, fondé rigoureusement sur votre dessin, vous a plu.
J'ai cherché à être fidèle à votre dessin respectueusement et pourtant prenant la liberté d'interpréter par le moyen d'une couleur dans le caractère sobre et le style du dessin en question.
C'est une synthèse d'Arlésienne si vous voulez ; comme les synthèses d'Arlésiennes sont rares, prenez cela comme œuvre de vous et de moi, comme résumé de nos mois de travail ensemble.
Pour le faire j'ai payé pour ma part encore d'un mois de maladie, mais aussi je sais que c'est une toile qui sera comprise par vous, moi, et de rares autres, comme nous voudrions qu'on comprenne. Ici mon ami le Dr Gachet y est après deux, trois hésitations venu tout à fait et dit : « Comme c'est difficile d'être simple » Bon - je vais encore souligner la chose en la gravant à l'eau-forte, cette chose-là, puis basta. L'aura qui voudra.
Avez-vous aussi vu les oliviers ? Maintenant j'ai un portrait du Dr Gachet à expression navrée de notre temps. Si vous voulez, quelque chose comme vous disiez de votre Christ au jardin des oliviers, pas destiné à être comprise, mais enfin jusque-là je vous suis et mon frère saisit bien cette nuance. (...)
( à suivre )

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