mercredi 12 octobre 2016

JOURS INTRANQUILLES À AUVERS (8-fin)

Lettre à Wil  (5 juin 1890)

Ma chère sœur,
Mon portrait à moi est presque aussi ainsi, le bleu est un bleu fin du Midi et le vêtement est lilas clair. Le portrait d'Arlésienne est un ton de chair incolore et mate, les yeux calmes et fort simples, le vêtement noir, le fond rose et elle est accoudée à une table verte avec des livres verts.
Mais dans l'exemplaire qu'en a Théo, le vêtement est rose, le fond blanc-jaune et le devant du corsage ouvert de la mousseline d'un blanc qui tourne sur le vert. Dans toutes ces couleurs claires les cheveux seuls, les cils et les yeux font des taches noires.
Je ne réussis pas à en faire un bon croquis. Il y a de Puvis de Chavannes à l'exposition un tableau superbe. Les personnages sont vêtus de couleurs claires et on ne sait pas si c'est des costumes de maintenant ou bien des vêtements de l'antiquité. Deux femmes, toujours en longues robes simples, causent d'un côté, des hommes artistes de l'autre, au centre une femme, son enfant dans les bras, cueille une fleur sur un pommier en fleur. Une figure sera bleu myosotis, une autre citron clair, une autre rose tendre, une autre blanche, une autre violette. Le terrain, une prairie piquée de fleurettes blanches et jaunes. Des lointains bleus avec une ville blanche et un fleuve. Toute l'humanité, toute la nature simplifiée mais comme elle pourrait être si elle ne l'est pas. (...)
J'ai revu aussi avec plaisir André Bonger qui avait l'air fort et calme et qui raisonnait ma foi avec une grande justesse sur des choses artistiques. Cela m'a fait grand plaisir qu'il soit venu les jours où j'étais à Paris.
Merci encore de tes lettres, à bientôt, je t'embrasse en pensée.

                                                                                                                       t.à t.
                                                                                                                  Vincent.

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