dimanche 10 juillet 2011


Je suis avec Natch sur une terrasse. C'est le matin, il fait beau. La terrasse est entourée d'un mur bas. Jusqu'à l'horizon, des monts boisés. Aucune construction, rien que la forêt de résineux, à perte de vue. Nous sommes au pied du mur, regardant nos pieds. Je lui donne une de mes sandales pour qu'il l'essaye. Ce faisant, il perd l'équilibre et tombe par-dessus le mur. Tremblant comme une feuille, j'assiste à la chute, d'une hauteur qui me semble vertigineuse. En contrebas, la forêt est insondable. Je vois un bosquet qui prend feu à l'endroit où il est tombé. J'appelle pour chercher de l'aide, mais je ne croise que des femmes qui ne m'entendent pas. Pas un homme dans ce lieu qui ressemble à un château en Bavière. Je trouve enfin sa femme. Elle est avec ses filles. Je lui dis ce qui s'est passé. Je pleure à chaudes larmes. Elle me dit de ne pas m'inquiéter, qu'il est sûrement en  vie. "Il est solide, il s'en sortira". Peut-être, mais dans quel état ? Peu après, un ambulancier ramène N. sur un brancard, entièrement couvert de bandelettes, sauf la tête qui est intacte. Il se lève et nous raconte sa chute, comment les plus gros obstacles, rochers, arbres, l'ont épargné. Il a l'air en pleine forme, je n'en crois pas mes yeux. Sa femme ne manifeste ni étonnement, ni émotion particulière. Elle me regarde en coin, avec un petit sourire complice du genre "tu vois, j'avais raison, il est solide". Ses filles passent et repassent entre nous comme si de rien n'était. Devant mon incrédulité proche de celle d'un mauvais chrétien, N. défait les bandelettes pour donner du crédit à son récit. Le corps nu et filiforme est intact, pâle comme l'ivoire. C'est une image du Christ inversée, un négatif de la foi. La tête et l'extrémité des membres sont vierges de toute trace, exempts de la moindre blessure. Par contre, plusieurs parties du corps sont suturées de points en forme de x, formant des petits groupes de points de croix noirs, plus ou moins serrés. Deux ou trois x pour une petite blessure, une concentration de x pour les parties les plus touchées. Je suis abasourdi, car N. décrit tout cela sur le ton d'un professeur d'anatomie devant ses élèves. Sont marqués, les cuisses, le thorax, les épaules et le haut des bras, le cou. Je m'aperçois que j'ai quelques pin's piqués dans le gras de la cuisse, comme des tiques sur un chien. Ils ont la forme de minuscules palettes de peintre, sans le trou pour le pouce. La surface colorée est émaillée, brillante comme un bonbon. N. les retire de ma jambe comme si c'étaient des ventouses sur un hérétique. "C'est la musique qui fait ça", me rassure-t-il. Je remarque un disque posé sur le brancard vide. La pochette est austère, en papier kraft, avec juste les titres des morceaux écrits en petits caractères. Sur certains titres, des petites croix en x, sur d'autres non.

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